- Tu sais quoi ? Je m'en rappelle comme si c'était hier. Que ce jour-là j'ai voulu te dire que je t'aimais, mais tu ne m'en as pas laissé le temps, bavarde que tu es ! Alors je te le dis aujourd'hui : je t'aime Charlen.
// Il n’y avait pas réellement de mots, ni même d’expression pour décrire l’état d’esprit de Charlen. Un beau mélange de sidération, de surprise, de cœur serré mais accompagné d’une douce sensation… Contrairement à cet après-midi passé, elle ne s’y été pas attendue. Pour être tout à fait honnête avec elle-même, la brune se doutait bien que Caleb allait lui dire quelques mots lourds de sens ce jour-là, cocktails à la main. Elle ne savait pas pourquoi, elle avait paniqué.
Pourtant Charlen était sûre de sa réponse. Cela faisait même un petit moment que l’idée lui trottait dans la tête, mais l’audace n’avait jamais été au rendez-vous. Quoique, ce n’était pas vraiment une question d’audace. Charlen, avant Caleb, ne s’était jamais accordée du temps, de l’envie ou même de la motivation pour une relation sérieuse, et de manière plus vague, l’amour.
Parce qu’elle était du genre à avoir une petite dizaine de crush par jour, elle était du genre à se perdre dans des pages interminables de romans à l’eau de rose, elle était du genre à être une oreille attentive lorsqu’il fallait écouter les péripéties passionnées de sa mère, de son père et Ariana, d’Isaac et Katleen… sans jamais avoir éprouvé ce besoin de raconter les siennes en retour. Parce qu’elle était du genre à programmer, planifier, faire des montages de listes et de plannings sur le court ou le long terme ; et que la case « romance » avait été laissée en suspens au profit d’une carrière professionnelle qu’elle voulait magistrale.
Elle avait eu peur que ses plans réglés au centimètre carré ne fassent peur à Caleb, et que ce dernier finisse par prendre les jambes à son cou en se rendant compte que Charlen était un métronome et un minuteur combinés. Peut-être qu’il aurait eu cette impression de trop s’engager si Charlen avait fait ses aveux.
Elle n’avait plus l’âge des amourettes lycéennes, et à vrai dire, elle n’en a jamais profité, ainsi son comportement s’en était retrouvé tout chamboulé. C’était en partie la raison pour laquelle elle s’était laissée allée avec Caleb, pas besoin de déclarations niaises à tout bout de champs, pas besoin de roses rouges et de pétales tous les jours. Leurs plaisanteries et son sourire lui suffisait amplement.
Néanmoins elle avait l’impression que si elle avouait à Caleb que ses sentiments étaient devenus plus profonds, elle renoncerait à cette douce légèreté pour prendre d’un coup trop d’engagements. Dieu qu’elle avait peur. Peur de le perdre, et en conséquent perdre pied avec. Et elle se disait que tout ça n’était pas censé la mettre dans un tel état, il y avait quelques minutes elle était en plein fou rire n’est-ce pas ? Dieu qu’elle avait peur. Sa lèvre inférieure tremblait presque.
Alors autant être honnête jusqu’au bout. //
- Je ne suis pas bavarde…
// Elle se serait donnée la plus cuisante des gifles. //
- Oh Caleb, j’ai tellement peur, lâcha-t-elle, penaude. Je m’en fous si j’ai l’air pathétique là, mais tu vois, quand je regarde loin dans mes plans, t’es encore là et parfois je me dis que chambouler ses projets de la sorte ça pourrait me freiner.
Mais même si c’était pas prévu comme ça, tu mérites que je mette mes frousses de côté, celles de ne pas suivre mon programme de vie comme je l’avais décidé au départ. Je t’aime aussi Caleb.